• Un texte totalement improvisé, alors que je discutais sur msn avec un ami très proche.
    Nous délirions comme à notre habitude, ensemble, et ainsi, sans se concerter,nous nous sommes mis à débiter cette prose, chacun notre tour, répondant à l'autre.
    Moment inoubliable, cher à mon coeur. Ainsi est né ceci.


    Improvisation Lyrique

    L'Ami. / Lili-A.


    Je t'emmènerai de manière innocente et bucolique dans une forêt calme, comme on en trouve sûrement quelques-unes dans le monde... Et il y aura une jolie étendue d'eau claire, et des racines tendues vers le ciel, rendues lisses par l'érosion.

    Et donc, je m'éclipserai sur un prétexte quelquonque, et il y aura cette voix en toi qui répètera : « comme cette eau est claire, comme elle est attrayante », et tu te déshabilleras, et plongeras, nue, dans l'eau. Tu te baigneras un instant, et moi, je materai tout de mon recoin derrière les fourrés.

    J'aurai revêtu ma peau de Faune (ma peau réelle ), et en t'observant je deviendrai tout fou parce que l'on sait que les faunes sont fous des Nymphes des eaux.

    Et donc, tu sortiras des eaux et te sèchera au soleil... Et les racines seront très attirantes (et oui, c'est une clairière magique...), et de nymphe des eaux, tu deviendras nymphe des arbres, Dryade Dryade, tu plongeras vers ces vîts végétaux tendus vers toi... (Magie des faunes).

    Tu offriras ton corps à la nature, et tu diras : « Comme c'est bon d'offrir son corps à la nature! ».

    Et moi je penserai : « je serais plutôt de nature à m'offrir son corps... ».

    Mais au pays des faunes et des dryades, les pensées sont comme les paroles, elles voyagent d'un esprit à l'autre et elles t'atteindront.

    Et là, tu me verras...

    La dryade, émue et fiévreuse déjà, entendant ces pensées venues du tréfonds de l'âme d'un observateur inconnu, s'arrache soudain à ses contemplations, au don qu'elle s'apprêtait à faire à la Nature son aimée...

    Se retournant, elle aperçoit alors cette créature, fougueuse et parfaite incarnation de son amour premier.

    Son cœur, pourtant d'habitude figé au fond de sa poitrine tambourine et martèle sa poitrine, tandis que la sève originelle se met à circuler dans ses veines, battant ses tempes, réchauffant son corps.

    (C'est ailleurs que bat le sang du faune.)

    En le fixant de ses profonds yeux verts, elle s'avance, presque féline, jusqu'au cœur de la clairière, et se couche là, sur un tapis de mousse claire et velours...

    Son corps est encore ruisselant ; est-ce de cet instant, auparavant, où elle était encore Nymphe des eaux? Ou est-ce la fièvre qui prend possession d'elle-même, tandis qu'elle sent l’appel bestial et irrésistible du mâle, qui l'observe?

    Le faune, émergeant à moitié de son fourré, reste ostensiblement à l'écart, observant la dryade.

    Leurs âmes semblent reliées l'une à l'autre...Le moindre frisson de l'un se répercute chez l'autre... Une tempête est à l'œuvre, tempête irréversible, de désir et de chair... chair végétale, animale et féerique...

    Dans son esprit, des mots, difficilement se forment, échappant un instant à l'instinct primaire qui la possède, pour mieux lui céder ensuite : « Viens...Mon corps est à toi... ».

    Et tu es là... près de Moi.

    La fourrure du faune frissonne, est-ce le fait d'un soudain courant d'air ou celui de l'insatiable désir qui l'attire vers cette créature magique, comme lui? Il a déjà séduit maintes et maintes mortelles mais aucune n'a encore réveillé de tels... Comment appeler cela? ... Il a entendu parler les humains de sen... sang Tymand? Il secoue la tête. « Pas moi, pense t-il à mi-mots, je suis une créature... de désir. ».

    Il s'approche timidement de l'espace à présent plein de mousse dense et humide, tiède et douce, sur lequel est allongée la Dryade.

    Il cache comme il peut, se glissant de fourré en fourré, la colonne de chair dressée devant lui par les forces magiques qui l'ont imaginé à l'aube des temps. Les Dieux ont voulu contenter le premier des faunes, un homme qui n'avait pas la force d'honorer toutes les femmes qu'il souhaitait séduire. Mais le don des Dieux est toujours à double tranchant, et le faune est maintenant encombré plus que comblé par ce vît qui se dresse à la moindre caresse du vent...

    Il glisse de buisson en buisson jusqu'à se tenir derrière l'arbre le plus proche de la dryade alanguie. Il la regarde et éprouve pour la première fois gêne et timidité, pudeur.

    La dryade, son âme et son corps délicieusement emportés par des torrents de sensations qu'elle n'ose pas même nommer, se contorsionne frénétiquement sur ce tapis de mousse...

    Elle ne peut contrôler les différentes facettes qui font ce qu'elle est, tout au fond d'elle, et devant les yeux ébahis du Faune, son corps, à une vitesse déconcertante, prend tour à tour multiples formes...

    En un instant, de dryade la voici fée, puis démon de flamme et de chair; biche essoufflée qui râle au sol; douce brise qui murmure son amour à l'oreille de celui qui est venu éveiller sa vraie nature...

    Le Faune, loin d'être déconcerté par cette manifestation simultanée des multiples et innombrables facettes de la dryade, en ressent davantage encore de désir et ose quelques pas supplémentaires dans sa direction. Il est comme hypnotisé par la beauté de celle qui se révèle ainsi à lui et ne peut empêcher son visage de se transformer, lui aussi.

    Ainsi, sur son corps de Faune, en une infime fraction de seconde, passent les apparences d'un grand ensorceleur, d'un loup gris, d'un corbeau, d'un lutin et d'un gnome. Il est tour à tour ange de Dieu et habitant de Féerie, bébé braillant et vieil homme plein de sagesse. « J'ai été un homme puis un renard, un oiseau, et un poisson, j'ai compris ensuite, et me suis souvenu de ma vraie nature... »

    La litanie si souvent entendue résonne à l'intérieur du crâne du faune et est transmise à toute la nature alentour. Les arbres la transmettent aux oiseaux qui la donnent aux insectes qui l'offrent aux fleurs, qui la disent à la terre qui revient en envelopper le corps tremblant de la dryade.

    C'est toute la vérité du monde, le désir et le plaisir, qui entourent la compagne du faune.

    Celle-ci, dans un brusque sursaut, redresse son buste et regarde en direction de l'être fantastique qui n'est plus qu'à quelques pas...

    Elle se lève, ses jambes chancelant sous le poids de la fureur de ses sentiments, et essaie de recouvrer peu à peu son équilibre.

    D'un regard à la fois sûr, brûlant, et suppliant, elle l'appelle, et tend vers lui une main tremblante.

    Le Faune tend la main vers elle, leurs doigts ne sont qu'à une dizaine de centimètres...

    Un éclair passe entre leurs mains, aiguisant leur désir...

    Elle se laisse basculer en avant, vers lui, et murmure intérieurement : « Si tu me rattrapes, c'est que tu es l'appui sur lequel m'appuyer... Oh! Rattrapes-moi... Je serai à toi pour l'Eternité... ».

    Le faune ne sait plus ce qu'il fait, son corps seul agit et commande, il plonge et rattrape la Dryade, il la serre contre lui et elle sent pulser contre son ventre tout le désir et l'amour de la terre, concentrés en cet être qui la maintient dans sa chaleur.

    A la fois, plus rien n'est et tout existe... Tout se confond, et tout s'éclaire...

    Des visions par milliers lui apparaissent, sans même savoir si elles lui viennent de sa propre personne, de la nature, ou bien de cet être qui déjà, n'est plus rien sans elle, comme elle sans lui.

    Il la plaque contre le tronc de l'arbre qui, l'instant d'avant encore, servait de masque à sa pudeur, et le tronc s'ouvre pour eux. Ils se fondent dans l'arbre, deviennent sa sève et ses branches, chacune des tiges des feuilles nées, en train de naître ou de mourir, en train de vivre... Ils sont chacun des minuscules insectes qui grouillent entre l'écorce, ils sont l'oiseau qui gazouille depuis son perchoir, et le vent dans les branches, et la poussière dans le vent, et l'eau dans la poussière, et le nuage dans le ciel, et le ciel lui-même, le soleil et l'univers.

    Ils ne sont rien l'un sans l'autre parce qu'ensemble ils sont tout.




    Lili-A. ©

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